URL: https://linuxfr.org/news/interview-de-sebastien-rohaut-auteur-de-livres-notamment-sur-linux Title: Interview de Sébastien Rohaut, auteur de livres notamment sur Linux Authors: Ysabeau Davy Defaud et tankey Date: 2020-07-11T15:42:16+02:00 License: CC By-SA Tags: interview, livre et linux Score: 6 [Sébastien Rohaut](https://linuxfr.org/users/slyce) est un « vieil habitué » de _LinuxFr.org_ (vingt ans, mazette !), [Ingénieur Diplômé Par l’État](https://linuxfr.org/users/slyce/journaux/partage-d-experience-comment-je-suis-devenu-ingenieur-diplome-par-l-etat-a-44-ans) (félicitations, une fois de plus, pour ce titre). Il nous a gratifié récemment d’un [excellent journal sur les systèmes embarqués pour voiture](https://linuxfr.org/users/slyce/journaux/tomtom-sdcard-et-systeme-embarque-acceder-au-systeme-de-fichiers). Sébastien est aussi un auteur de livres sur l’informatique aux [éditions ENI](https://www.editions-eni.fr), un éditeur cher à notre cœur puisqu’il est l’un de ceux grâce auxquels les personnes qui contribuent au site peuvent gagner un livre. Il vient de mettre à jour son livre _[Linux : maîtrisez l’administration du système](https://www.editions-eni.fr/livre/linux-maitrisez-l-administration-du-systeme-6e-edition-9782409025716)_, qui en est à sa sixième édition. Il a, en outre, récemment écrit une mise à jour (la sixième, elle aussi), de celui sur la [préparation à la certification LPIC‑1](https://linuxfr.org/redirect/106599). Dans son catalogue, on retrouve également des livres sur l’algorithmique, notamment avec Python. Pour tout dire, je crois bien que Sébastien est un grand bosseur, et, s’il écrit ses livres comme il a répondu à cette interview, ils doivent se lire facilement et agréablement. ---- [La bibliographie de Sébastien](https://www.editions-eni.fr/sebastien-rohaut) [Son dernier journal sur les systèmes embarqués](https://linuxfr.org/users/slyce/journaux/tomtom-sdcard-et-systeme-embarque-acceder-au-systeme-de-fichiers) [Le livre « Linux : maîtrisez l’administration du système »](https://www.editions-eni.fr/livre/linux-maitrisez-l-administration-du-systeme-6e-edition-9782409025716) [Le livre « Linux : préparation à la certification LPIC‑1 »](https://www.editions-eni.fr/livre/linux-preparation-a-la-certification-lpic-1-examens-lpi-101-et-lpi-102-6e-edition-9782409024962) ---- **Qu’est‑ce qui t’a donné l’idée d’écrire ton premier livre ? Sur quoi portait‑il et est‑il toujours disponible ?** C’était en 2005. J’étais idéaliste et quasiment certain, vu l’incroyable qualité des environnements de bureau (notamment KDE 3) et des distributions qui sortaient en cette période, que Le Grand Jour allait rapidement arriver : l’avènement de Linux en tant que système d’exploitation pour poste de travail et PC à la maison, était proche, Windows n’avait qu’à bien se tenir ! J’avais créé un groupe d’utilisateurs Linux, appelé Slyunix, autour d’un site Web communautaire qui fonctionnait plutôt bien, j’avais organisé une grosse _Linux party_ au sein d’une école qui avait réuni plus de 250 personnes, et je mourrais d’envie de convertir le grand public. Alors je me suis dit qu’écrire un livre pour aider les gens à passer de Windows à Linux serait bien pratique. Je me suis basé sur l’une des distributions les mieux intégrées et faciles à l’époque, SUSE Linux, et j’ai écrit _SUSE Linux 10.1 — de Windows à Linux par la pratique_, qui couvrait l’histoire de Linux, l’installation, la configuration de KDE, la bureautique, Internet, le multimédia, le shell, la personnalisation, le dépannage, mais aussi XGL et Compiz pour le bureau 3D. C’était la grande classe ! On trouve encore l’annonce sur _LinuxFr.org_ : . Outre l’idéalisme, il y a une seconde raison qui m’a poussé à écrire : le besoin de reconnaissance professionnelle. En 2005, je ne m’épanouissais pas dans mon travail (j’étais chef de projet dans l’informatique décisionnelle, un peu contre mon gré), je voulais être ingénieur système mais mon employeur (SSII) rechignait à me changer de poste et les autres sociétés demandaient de l’expérience. J’ai alors forcé le destin : j’ai passé une certification Linux, j’ai écrit mon premier livre, et mon précédent boss chez mon client, ayant repris une équipe d’intégration système, m’a donné ma chance. Une de ces trois composantes aurait manqué, que je ne serais pas là où je suis aujourd’hui. Il faut aussi penser à la logique financière, même si les sommes perçues sont parfois assez faibles par rapport au travail fourni… **Comment as‑tu trouvé un éditeur ?** L’association Slyunix, dont j’étais le président, avait un emplacement au salon Solutions Linux 2005. C’est un grand et bon souvenir, ce village des associations. Les éditions ENI y étaient aussi, et leurs représentants avaient fait le tour des stands avec une liste de sujets pour lesquels ils recherchaient des auteurs. J’ai donné mon adresse, puis ils m’ont recontacté. Après un essai d’une vingtaine de pages, nous avons pu discuter sujet et contenu, c’est parti comme ça. Ça fait quinze ans de collaboration. **Qu’est‑ce qui fait que tu vas écrire un livre sur un sujet ou un autre ?** Il y a deux possibilités : soit je propose un sujet, soit l’éditeur pioche dans son vivier d’auteurs pour lui proposer la rédaction d’un nouveau livre ou d’une mise à jour. Le premier, sur SUSE Linux et le passage de Windows à Linux, me tenait à cœur. Pareil pour le livre sur la haute disponibilité : c’était mon cœur de métier à l’époque, j’ai proposé le sujet et j’ai mis beaucoup de temps à l’écrire. C’était compliqué, trop peut‑être, il n’a pas eu beaucoup de succès. Pour ceux sur l’algorithmique (j’ai été développeur pendant de nombreuses années) ou la mise à jour du livre sur Ubuntu, c’est l’éditeur qui me l’a proposé. Pareil pour mon pavé sur la certification LPIC1 et l’administration système : c’est une proposition qui est tombée lorsque j’ai été certifié et ça tombait pile au bon moment pour eux. Et moi, qui était aussi professeur d’Unix à l’époque, ça m’a beaucoup plu. C’est devenu une référence dans plusieurs pays francophones et hispanophones. **Avec quels outils écris‑tu tes livres, est‑ce que cela a changé au cours du temps ? Et pourquoi ces logiciels ? Est‑ce que l’éditeur t’impose un format particulier ?** J’ai écrit des livres avec OpenOffice, puis LibreOffice, et Microsoft Word. Je fais mes schémas avec LibreOffice Draw ou draw.io. Depuis que j’utilise un Mac, j’ai tendance à délaisser LibreOffice qui souffre de quelques soucis de performances m’empêchant de l’utiliser dans de bonnes conditions (utilisation processeur avec les écrans _Retina_), et c’est très malheureux tant cette suite bureautique est de qualité. L’éditeur est agnostique, il peut fournir des feuilles de style pour les deux suites. La relecture et les corrections se font avec le format PDF, donc n’importe quel bon lecteur PDF permettant les annotations et le surlignage suffit. Les feuilles de style sont rigoureuses, elles permettent d’avoir une vue du plan et du résultat final. Le plus dur est d’arriver à faire entrer les sorties de terminal dans la largeur indiquée, il faut régulièrement tricher. Je dois tester tous mes exemples sur plusieurs distributions, parce j’ai régulièrement de très mauvaises surprises selon les choix faits par les éditeurs, surtout lorsqu’il s’agit d’une mise à jour d’un livre, et c’est quelque chose qui m’énerve beaucoup, le manque d’homogénéité selon les distributions, que ce soit pour des composants système comme les configurations de _systemd_, ou des commandes simples, comme _cal_ ou _nc_, dont les syntaxes varient. Sympa pour les scripts… J’ai donc soit des machines physiques en amorçage multiple (merci GRUB et [Clover](https://sourceforge.net/p/cloverefiboot/wiki/Home/)), soit plusieurs machines virtuelles VirtualBox ou KVM via libvirt, généralement une dizaine, avec plusieurs distributions (Fedora, CentOS, Ubuntu, openSUSE), parfois dans plusieurs versions. C’est aussi le souci avec certains livres : il faut garantir que le contenu s’applique à des distributions vieilles de plusieurs années mais encore supportées en entreprise, ce qui implique par exemple de devoir encore expliquer init System Ⅴ ou [Upstart](https://fr.wikipedia.org/wiki/Upstart). **Tu as aussi coécrit des livres. Dans ce cas, comment se passe le travail de rédaction ? Qui décide de qui va écrire avec qui ? Toi ? L’éditeur ? Le hasard ?** Jusqu’à présent, c’était le hasard. Quand un auteur ne souhaite plus mettre à jour son livre, par exemple s’il manque de temps ou a changé d’orientation professionnelle, l’éditeur va chercher quelqu’un pour le faire à sa place. C’est ce que j’ai fait pour le livre sur Ubuntu. De même, j’ai lâché les mises à jour des livres d’algorithmique, quelqu’un d’autre a pris le relais. C’est ainsi que sur l’édition suivante, deux noms apparaissent : l’auteur original, et celui qui a procédé à la mise à jour. Et si j’arrête, mon nom finit par disparaître lui aussi. En revanche, j’ai comme projet de réécrire le livre sur la haute disponibilité. C’est devenu tellement ardu que j’ai proposé une double écriture, avec un ancien collègue et ami. C’est encore en projet, mais dans ce cas, ce sera la première fois que je choisirai avec qui écrire. Nous avons déjà travaillé ensemble sur de nombreux documents et présentations (en _meet‑up_ par exemple), et soit nous travaillerons ensemble sur un même chapitre, soit chacun écrira le chapitre dont il aura la responsabilité. **En moyenne pourrais‑tu nous donner une estimation du temps que cela prend d’écrire un livre, ou le mettre à jour ?** Trop ! En démarrant de zéro, il faut compter quatre à six mois pour environ cinq cents pages une fois en rayon. Ce n’est pas du temps plein : je travaille et j’ai une vie de famille. Je m’y colle généralement le soir et les week‑ends. Disons, une trentaine d’heures par semaine. Je m’accorde aussi des jours de repos. Et c’est selon la complexité du sujet. Une mise à jour est plus rapide, disons deux mois. Je trouve que c’est plus compliqué de mettre à jour que de partir d’une page blanche : il faut réinstaller tous les environnements, tester à nouveau et réactualiser la plupart des exemples, en trouver des nouveaux, creuser chaque nouveauté, etc. Surtout, surtout, il ne faut pas écrire d’âneries, avec une date limite à tenir. Et à chaque fois, j’hésite à supprimer du contenu, que je trouve toujours pertinent, et le livre grossit à chaque nouvelle édition. C’est ainsi que de cinq cent cinquante pages à l’origine, le livre de certification a largement dépassé les neuf cents pages. C’est long et parfois décourageant, mais il faut s’accrocher, jusqu’à la sortie finale. **Comment es‑tu rémunéré, perçois‑tu des droits d’auteurs en fonction du nombre de vente, un forfait ? Est‑ce que cela rémunère le temps passé à la rédaction, par exemple si on se base sur le montant horaire du SMIC[^1] (il faut bien donner une base, et celle‑ci est objective) ? Peux‑tu négocier le montant de ta rémunération ?** Tout d’abord une précision : on ne devient pas riche en écrivant des livres techniques. En tout cas, pas moi. Il y a trois formules de rémunération disponibles : une commission sur chaque livre vendu, disons n % du prix de vente hors taxes, une formule mixte avec une partie forfaitaire et un pourcentage, n/2 % sur les ventes, ou un forfait fixe, dont le montant est défini selon la collection. On est mieux rémunéré dans une collection sur les certifications, par exemple. Que le livre fasse quatre cents pages ou neuf cents pages, c’est le même tarif. Depuis le début, je privilégie le forfait, partant du principe qu’il vaut mieux tenir que courir : on ne sait pas si le livre va bien se vendre et ça fait un revenu complémentaire. Disons qu’un livre complet va prendre quatre cents heures à écrire, sur quatre mois. Au SMIC horaire actuel (10,15 euros), si je prends le forfait, alors ça va me rapporter un peu plus que ça pour la collection _Certifications_, mais moins pour une collection _Ressources Informatiques_. Avec le recul, les livres sur l’administration et la certification se sont vendus à plusieurs dizaines de milliers d’exemplaire sur les dix dernières années. J’aurais dû prendre la commission sur chaque livre vendu… **Est‑ce que c’est toi qui décides de quel livre écrire ou est‑ce ton éditeur ?** J’ai déjà répondu dans la troisième question. Les deux. :) **Apparemment, tu n’as qu’un seul éditeur ? Est‑ce un choix délibéré ?** Je n’ai jamais cherché à changer d’éditeur. Aucun autre éditeur (de livres) ne m’a d’ailleurs approché. Jusqu’en 2013, j’écrivais des articles pour _[Planète Linux](http://www.dppresse.com/)_, et d’autres magazines m’avaient approché, j’ai décliné. Je reste fidèle à ceux qui m’ont accordé leur confiance. **Sous quel régime tes livres sont publiés : droits d’auteur « classiques », licence de type Creative Common par exemple ? Est‑ce un choix délibéré de ta part ?** Ce sont des droits d’auteur classiques. Je n’ai pas choisi, je n’ai jamais réfléchi à la question, d’ailleurs. Et je ne pense pas avoir le choix. Il faudrait voir directement avec l’éditeur. **Peux‑tu nous dire quel est l’état de ta réflexion sur le droit d’auteur et les licences de type Creative common ?** Tout ce que je publie hors Éditions ENI est soit sous licence Creative Commons (comme les dépêches de _LinuxFr.org_, non ?), soit, s’il s’agit de code, sous GPL : ce qu’il y a sur mon dépôt GitHub, mes contributions à des projets existants comme des modules Ansible, etc. Si le public trouve un quelconque intérêt à réutiliser mon travail, alors tant mieux. Il arrive aussi que je tombe sur des parties complètes de mes docs (notamment mes supports de cours de PHP, de shell et d’administration système) sur divers sites, alors que je n’avais pas spécifié de licence particulière, mais généralement ce sont des PDF et mon nom y est présent, je n’y vois aucun inconvénient. Si je devais choisir une licence, ce serait CC BY‑SA : on garde son nom sur l’œuvre, et chaque personne est libre de l’adapter en y ajoutant son nom. Concernant ce qui est publié par les Editions ENI, il s’agit d’une œuvre commerciale. Tout ce que j’écris et mets à jour pour eux reste dans ce cadre. Cependant, il est possible que pour les ouvrages non réédités, tombant en désuétude, je puisse réclamer la restitution de mes droits et, dans ce cas, je pourrais envisager d’en libérer certaines parties. Tiens, il va falloir que j’en parle avec mon éditeur… **Si l’on regarde ton catalogue, on voit que tes livres ne sont disponibles que sous deux formes : papier ou en ligne, pas de format EPUB par exemple. Est‑ce un choix de ta part ?** Non, c’est le choix par défaut de mon éditeur. Cela dit, on peut imprimer la version en ligne au format PDF. En tout cas, ça fonctionnait il y a quelques années. Je ne pense pas que l’éditeur apprécierait de voir les PDF ou EPUB diffusés sur divers canaux alternatifs (même si c’est parfois le cas). **Comment cela se passe avec l’éditeur ? Par exemple, est‑ce qu’il te tient au courant du nombre de ventes ? Est‑ce qu’il te demande de participer à des opérations de promotion des livres ; es‑tu rémunéré pour ce faire ?** Ça se passe très bien. Nous avons des contacts réguliers, par courriel ou téléphone. J’ai aussi eu l’occasion de me déplacer dans leurs locaux (à côté de Nantes) et de les rencontrer sur les salons. Le nombre de vente ne m’est communiqué que si je le demande, avec parfois de bonnes surprises, mais aussi des déceptions. L’éditeur a une équipe très performante de personnes dédiées aux relations avec les auteurs, et assure un suivi régulier avant, pendant et après l’écriture d’un livre. Pareil pour les correcteurs : certains ont la capacité d’analyser en profondeur les exemples et de trouver des coquilles, comme ce fut le cas lors de ma dernière mise à jour où j’avais recommencé plusieurs fois une manipulation et mélangé les résultats… La promotion est effectuée par l’éditeur auprès des organes habituels (presse, vente en ligne, chaînes de librairies, grandes chaînes, etc.) mais demande aux auteurs de diffuser aussi de leur côté, par exemple sur les réseaux sociaux ou les sites spécialisés. J’ai aussi participé à une séance de dédicace. Tout ceci n’est évidemment pas rémunéré. Mais, j’ai eu aussi la chance d’organiser une formation pour l’institut de formation ENI qui, elle, a été rémunérée. **Tu nous a régalé récemment d’un très intéressant [journal sur les systèmes embarqués pour voiture](https://linuxfr.org/users/slyce/journaux/tomtom-sdcard-et-systeme-embarque-acceder-au-systeme-de-fichiers), lequel s’est, de surcroît, comme souvent sur _LinuxFr.org_, attiré des commentaires intéressants. Quand tu écris un livre, tu n’as pas ce genre de retour immédiat, est‑ce frustrant ? As‑tu néanmoins des contacts avec tes lecteurs ?** Les visiteurs sur _LinuxFr.org_ sont généralement des gens techniques, comme la plupart des passionnés de Linux et de logiciels libres, et les journaux techniques attirent les commentaires. Et le plus surprenant, c’est que les commentaires, eux, ne sont généralement pas techniques, ouvrent souvent des débats (ou des trolls) ou fournissent des anecdotes. Le partage se fait souvent dans les commentaires. C’est enrichissant. Je poste peu, mais j’apprécie beaucoup les retours d’expérience, sur les miennes et celles des autres. Je pense que je vais écrire d’autres journaux. Pour les livres, c’est évidemment différent. En fait, c’est stressant, car les commentaires qui me sont remontés le sont soit quand un lecteur trouve une coquille (ce qui arrive, malheureusement), soit via les commentaires sur les sites de vente en ligne, comme Amazon ou la FNAC. Et c’est stressant ! Quand je tombe sur des commentaires à trois étoiles ou moins, je suis perturbé… jusqu’à ce que je m’aperçoive que c’est une critique sur un défaut d’impression ou le format du livre imprimé… J’ai eu la chance jusqu’à présent d’avoir de bonnes critiques. Il y a aussi de bonnes surprises, comme ce lecteur qui m’a attendu une fois à la sortie de l’école où je donnais cours pour me remercier, ceux qui me contactent directement par courriel pour me poser des questions, ceux qui m’ajoutent sur LinkedIn, ceux qui laissent des remerciements sur mon livre sur un article de mon éditeur, ceux que j’ai pu croiser sur des salons… Ceux qui me touchent le plus et qui me rendent fier sont les personnes qui me remercient car ils ont obtenu un job ou leur certification à l’aide de mon livre. **Au niveau professionnel, quels logiciels libres utilises‑tu, sur quel système d’exploitation ?** Depuis 2006, de passionné de Linux « à la maison » j’ai basculé dans le système Unix professionnel : ingénieur système, Ops, DevOps, Tech Lead d’une plate‑forme « digitale », dans cet ordre. Jusqu’en 2013, mon poste de travail était sous Linux, avec bien évidemment tous les outils qui allaient avec. Depuis 2013, mon employeur me fournit un Mac. Je dois avouer qu’Aqua est exactement le bureau que je voudrais sur un Linux, mais j’utilise Thunderbird, Firefox, iTerm2 et le gestionnaire de paquets [Brew](https://brew.sh/index_fr) qui sont libres. Côté serveur maintenant, ce n’est que du Linux, évidemment ! La plate‑forme numérique que je gérais était constituée d’environ deux cents serveurs, essentiellement sous Ubuntu LTS, et sous Red Hat (pour [OpenShift](https://fr.wikipedia.org/wiki/OpenShift)), avec des outils libres : HAProxy, NGINX, Jenkins, [Quagga](https://quagga.net/), [Keepalived](https://keepalived.org/index.html), Ansible, Docker, Kubernetes, [Pacemaker](https://fr.wikipedia.org/wiki/Pacemaker_(logiciel)), etc. Seules entorses au Libre : l’achat de licences OpenShift pour le support ([PaaS](https://fr.wikipedia.org/wiki/Platform_as_a_service "Platform as a service — Plate‑forme en tant que service") basée sur Kubernetes), et [F5](https://fr.wikipedia.org/wiki/F5_Networks) BIG‑IP (pour le [WAF](https://fr.wikipedia.org/wiki/Web_application_firewall "Web Application Firewall"), mais c’est sous Linux aussi). **Quelle est ta distribution GNU/Linux préférée et pourquoi, quels sont tes logiciels libres préférés ?** openSUSE et Fedora, sans aucune hésitation. openSUSE, c’est de la grande qualité. J’utilise beaucoup Fedora en ce moment, parce que c’est la seule qui ne casse pas ma configuration UEFI à l’installation. Ubuntu est sympa au premier abord, mais quand on creuse… Aïe… Ubuntu a tout de même réussi à flinguer ma NVRAM, ça m’a bien refroidi… Côté logiciels libres et poste de travail, outre les classiques (Firefox, Thunderbird, LibreOffice, etc.) j’apprécie énormément Kodi, que j’installe partout (macOS, Linux et Android), [HandBrake](https://handbrake.fr/), VLC, le bureau KDE, draw.io, KeePassXC, htop, Kid3, GIMP, Horos, Dolphin (l’émulateur) et Wine. Il en manque. Côté serveur, ce serait trop long, mais j’en ai cité une partie dans ma précédente réponse. **Quelle question aurais‑tu adoré qu’on te pose (évidemment, tu peux y répondre) ?** Est‑ce que Linux a changé ma vie ? Oui : depuis que je l’ai découvert en 1994 (pour avoir un compilateur C gratuit), c’est à la fois la source de ma passion et de mon métier, je n’aurais jamais pu m’épanouir dans ma vie active sans Linux, les logiciels libres, et même _LinuxFr.org_, phare durant les tempêtes. **Quelle question aurais‑tu détesté qu’on te pose (en espérant que je ne l’ai pas posée) ?** Pourquoi ai‑je abandonné Linux sur mon _desktop_ ? La réponse prendrait plusieurs pages d’arguments parce que c’est un sujet qui me fout vraiment en rogne tant c’est un énorme gâchis. J’ai répondu en 2013 dans un article sur _Planète Linux_ ; je me suis fait allumer par quelques fanatiques m’accusant de trahison à la Cause, mais je ne changerai pas ma réponse d’une virgule. **Merci beaucoup Sébastien.** [^1]: Le SMIC ou salaire minimum interprofessionnel de croissance, est, en France, le salaire minimum horaire en dessous duquel aucun salarié de plus de 18 ans ne peut être payé.